Possibilités, approches et limites d’une simplification administrative de la Politique agricole commune de l’UE
DOI:
https://doi.org/10.12767/buel.v0i226.275Abstract
Resumé
Pratiquement aucune autre exigence relative à la Politique agricole commune (PAC) ne fait l’objet depuis les années 1990 d’un consensus aussi large entre les parties concernées que celle d’une simplification administrative. Il est urgent de procéder à une simplification, et ce, pour les deux piliers de la PAC et pour tous les niveaux d’acteurs (l’UE, les États membres, c.-à-d. en Allemagne la Fédération et les Länder, les bénéficiaires des aides). Dans le contexte de la prochaine réforme de la PAC après 2020, le Conseil consultatif examine dans le présent avis les possibilités, les approches et les limites d’une simplification administrative. Il y approfondit la recommandation « Ramener la charge administrative à un niveau raisonnable » exprimée dans son avis « Pour une Politique agricole commune de l’UE axée sur l’intérêt général après 2020 : questions fondamentales et recommandations » (WBAE 2018 : 71).
La simplification administrative n’est pas une fin en soi. Elle doit respecter les exigences de l’État de droit en matière de légitimité de l’action administrative et de la protection, exigée par la démocratie, des intérêts financiers de l’UE et de l’État membre concerné. Une simplification administrative judicieusement menée ne compromet pas les objectifs visés par les mesures de la PAC et garantit une utilisation correcte des fonds publics. Elle a également vocation à réduire la méfiance et les craintes des autorités de mise en oeuvre des États membres vis-à-vis du risque d’imputation et, ainsi, à rétablir une marge de manoeuvre.
La revendication de simplification administrative s’adresse aux concepteurs des processus et donc, en règle générale, aux législateurs et aux administrations au niveau européen et des États membres, auxquels viennent s’ajouter en Allemagne les Länder.
Les causes de la complexité administrative de la PAC sont diverses et résultent, dans une large mesure, d’une structure fondamentale de la PAC et du contrôle administratif, qui a été instauré dans les années 1960 et 1970 et s’est ensuite accru de manière cumulative. Une partie de la charge administrative est due au cadre juridique de l’UE, une autre à la mise en oeuvre pratique en Allemagne.
La PAC actuelle poursuit avec une panoplie d’outils très variée un grand nombre d’objectifs, qui sont mis en oeuvre conjointement par l’UE et les États membres au moyen de l’exécution indirecte et de la coopération administrative. Elle est donc nécessairement complexe et lourde au niveau normatif et procédural. Au-delà de ce degré nécessaire de complexité et de charge administrative, la PAC a été surchargée de structures qui ont, à juste titre, incité tous les acteurs à appeler de leurs voeux une simplification. Les causes principales sont la situation juridique de l’UE, qui est confuse, se modifie fondamentalement à chaque nouvelle période de financement et continue en outre à changer en cours de période de financement, et la conception indûment stricte du Parlement européen et de la Cour des comptes européenne quant à l’utilisation correcte des fonds (niveau d’erreur maximum toléré de 2 %). Cette application rigoureuse de la discipline budgétaire a entraîné l’émergence d’un vaste système de contrôle redondant prévoyant des sanctions disproportionnées à l’encontre des États membres (risque d’imputation) et des bénéficiaires.
Les propositions de règlement de la Commission européenne pour la PAC après 2020 ont le potentiel nécessaire pour engager un changement de paradigme dans la PAC. Le « nouveau modèle de mise en oeuvre » doit modifier en profondeur la structure de gouvernance de la PAC. On ne peut pas dire avec certitude à l’heure actuelle si les propositions législatives entraîneraient une simplification administrative, mais le Conseil consultatif doute que les libertés accordées au premier abord aux États membres seront préservées lors de la mise en oeuvre concrète. Il craint qu’en l’absence de changements de fond, le nouveau modèle de mise en oeuvre ne fasse que transférer la charge administrative de l’UE aux États membres.
Le Conseil consultatif émet les recommandations suivantes pour ramener la charge administrative à un niveau raisonnable
1. Remplacer à long terme la culture de méfiance actuelle par une culture administrative commune à l’UE et aux États membres : la coopération administrative entre l’EU et les États membres présuppose une culture administrative commune aux parties prenantes, seul moyen de réduire la complexité actuelle des instruments de contrôle. Le système de sanctions devrait être intégralement progressif en fonction de la gravité (durée et ampleur) et de l’intentionnalité (préméditation ou négligence) de l’infraction.
2. Supprimer la limitation dans le temps des dispositions procédurales communes de la PAC : l’instauration de dispositions procédurales de la PAC continuant à s’appliquer au-delà de la période de financement favorise le développement d’une pratique administrative, judiciaire et scientifique, augmente ainsi la sécurité juridique et simplifie de ce fait les procédures en place.
3. Réduire, codifier et présenter à temps les dispositions d'application de la PAC : une réduction des dispositions d’exécution à un niveau minimum nécessaire dans l’UE et une synthèse systématique, au sein d’un ensemble législatif unique, des dispositions d’exécution européennes valables pour l’ensemble de la PAC, entraîneraient l’émergence d’une pratique administrative, judiciaire et scientifique et, de ce fait, une sécurité juridique accrue. Toutes les dispositions juridiques doivent être disponibles suffisamment longtemps avant le début d’une nouvelle période de financement.
4. La transposition du droit de l’UE au niveau national ne doit être administrativement plus complexe que dans des cas motivés : la mise en oeuvre financière au niveau national, y compris le contrôle, ne doit pas, dans la mesure du possible, entraîner de charge administrative supérieure à celle prévue par le droit de l’UE. Si la Fédération ou les Länder souhaitent programmer des mesures de soutien plus exigeantes afin d’augmenter la précision du ciblage et l’atteinte des objectifs, il faut déterminer dans quelle mesure cela justifie une charge administrative plus importante.
5. Procéder aux apurements et examens des performances sur la base d’indicateurs appropriés au lieu d’apporter la preuve de la conformité des dépenses : les États membres de l’UE ne devraient plus avoir à prouver à l’UE la conformité des dépenses, mais à lui remettre des apurements et examens de performance sur la base de critères appropriés. Si l’UE entend conserver la preuve de la conformité des dépenses, il faudra augmenter de manière appropriée le niveau d’erreur, qui est actuellement de 2 %.
6. Prendre en compte et réduire les coûts administratifs des États membres : lors de l’examen de l’efficacité des instruments de contrôle, l’UE devrait intégrer une évaluation approximative des coûts de contrôle et de sanction pour les administrations des États membres. La Fédération et les Länder devraient vérifier le caractère nécessaire des exigences nationales s’appliquant aux procédures administratives agricoles, mais aussi des exigences générales du droit relatif aux subventions et des règlements financiers et d’éviter notamment les redondances lors des contrôles.
7. Mettre en place un système d’audit unique : au sens du droit organisationnel, il convient de mettre en place un système d’audit unique à des fins de simplification administrative. La réduction de la densité des contrôles qui en résultera est réaliste, même sans restriction importante des principes de discipline budgétaire de l’UE, et possible dans le respect des limites fixées par le droit constitutionnel.
8. Réduire la charge administrative par des seuils de minimis adéquats : Les infractions minimes, qui n’ont qu’un impact financier relativement faible, et les écarts minimes de surface devraient être considérés comme des infractions mineures. La fixation des seuils de minimis ou des écarts négligeables devrait être laissée à l’appréciation des États membres dans un cadre fixé au niveau européen.
9. Renforcer le recours aux technologies numériques : en particulier pour les mesures « surfaces », il faut utiliser, davantage que ce n’est actuellement le cas, les données existantes et les technologies du numérique en tant que base de la conception, de la demande, de la décision et du contrôle des mesures.
10. Revaloriser le principe de confiance par rapport au principe de légalité : la subordination actuelle du principe de confiance au principe de légalité devrait être modifiée par un équilibre pondéré entre ces deux principes.
Il convient de mettre à profit la chance que constituent les prochaines décisions sur la PAC après 2020 et leur mise en oeuvre en Allemagne pour réduire la charge administrative occasionnée par la PAC et la ramener à un niveau raisonnable. Il faudra toutefois pour cela plus qu’une réforme exclusivement centrée sur la PAC et sur certains symptômes de la complexité administrative.
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